Pourquoi on a changé les règles ?

Periods are cool (les règles, c’est chouette!). C’était écrit, en lettres écarlates, sur ces culottes aperçues dernièrement chez Monki, l’antenne pointue du géant H&M. Sur le site de la marque, dans  son Monkifesto – 10 préceptes spécial « empowerment »- on lit aussi une interview de Kiran Gandhi, cette jeune femme qui, en 2015, a couru le Marathon de Londres sans serviette ni tampon. A l’arrivée, une tache de sang maousse entre les cuisses, elle a prononcé un discours destiné à sensibiliser au sort des femmes indiennes ou africaines qui n’ont accès à aucune protection périodique. Un peu gore ? Certes. D’autant qu’on a toutes grandi en regardant des pubs Vania & Co, avec des pipettes de liquide bleu et des créatures vêtues de blanc virginal. Mais l’ère des symboles et des périphrases, c’est fi-ni!

Aux Etats-Unis, ces temps-ci, les règles s’invitent non stop dans le débat politique et sociétal. Grand victoire: en vertu de l’« égalité menstruelle », serviettes et tampons ont été détaxés dans 10 états déjà (argument de choc dans la bataille: le Viagra, lui, l’était bien !). On boude de plus en plus les protections classiques, au bilan carbone désastreux, au profit des « coupes menstruelles » en silicone écolos. La jeune marque Thinx fait un buzz incroyable avec sa (ravissante) ligne de culottes « period proof ». Leur fibre révolutionnaire –qui évacue l’humidité en continu- rend serviettes et tampons obsolètes. Leurs pubs sont explicites, et le mannequin transgenre Sawyer DeVuyst (qui a encore ses règles malgré son «  traitement hormonal de transition », vous saurez tout…) est une de leurs égéries!

Appeler un chat un chat ? Parfait. Ne rien s’interdire à ce moment M du mois, voire claironner qu'on "les a" , en arborant un pin’s « petite culotte tachée », pourquoi pas ? Rien de tel pour couper la chique aux machos. Après avoir insinué que la journaliste Megyn Kelly, pour être aussi agressive, devait avoir « du sang qui coulait quelque part », le candidat Trump a fait le succès des hashtags #periodsarenotaninsult ou #menstruationsmatter ! En France, ça bouge aussi. Ceci est mon sang, ouvrage inspiré par la « révolution menstruelle en marche », vient de sortir à La Découverte. Les Petites Glo, version ado de la newsletter féministe Les Glorieuses, en parlent aussi bientôt  ! A quand l'adaptation des aventures de Toni Le Tampon, BD éducative imaginé par une jeune artiste  ?

Le plus drôle dans ce grand déballage ? Les jeunes Américaines briseuses de tabous, adeptes du « periods are cool », continuent à adorer les T-shirts à message « Lâchez moi, je suis en plein syndrome prémenstruel ». Elles s’épanchent sur #periods suck (les règles, ça craint !) ou l’hilarant #livetweetyourperiod, où on raconte ses maux de ventre et galères  en direct. Elles assurent au boulot, même les jours de « ketchup sur le steak » (imagé, non ?). Mais elles s’octroient aussi, aujourd’hui, le droit de se pelotonner sous la couette avec un « period buddy » (!) comme ce coussin-utérus , à personnaliser à sa guise. En clair : le droit de gagner sur tous les fronts ! Qui a dit que le féminisme faisait du sur place ?

Image: Monki