Pourquoi on va se planter ?

Dans les boutiques de Brooklyn ou NoLiTa, où il remplit souvent sa musette à tendances, Le Futiloscope New-York trouve que ça piétine sévère, côté déco. Toujours les mêmes « usual suspects » : le piléa dans son cache-pot, la fougère dans son hamac en macramé, le régiment de cactus…Quoique. Approchons-nous, palpons les feuilles d’un air détaché : c’est (de plus en plus souvent) du faux ! Ce superbe yucca ? En plastique. Cette collection de succulentes, dans ce coffee-shop qui ne jure que par le bio et le green ? Cette claustra de « plantes de concierge » au restau ? Idem.

Ces millenials ont tous les culots. Ils nous vantaient les joies neuneu du #plantparenting. Ils inondaient Instagram de clichés de leur petite #urbanjungle perso. Ils se ruent sur les « faux plants », omniprésentes soudain chez Urban Outfitters & toutes les enseignes de déco. Sur Ikea.fr, même topo : au rayon nouveautés, une forêt #tropicool synthétique ! A Paris, on se fait régulièrement avoir aussi. Sympa, ce nouveau mur…euh, végétoc ? Comme le décor #jungalow du Brebant Café.

Confinées jadis dans les salles d’attente, les plantes artificielles sont en plein retour de hype. Argument n°1 des nouveaux convertis ? Technique et matériaux ont tellement progressé qu’on ne distingue plus l’original de la copie. On reproduit à la perfection le bombé d’une feuille d’aloé, les découpes de nos chères Monstera, le toucher duveteux de certaines succulentes, ou les taches arty du Begonia Maculata, si difficiles à obtenir dans la vraie vie ! Tout ça sans arrosage ni ennuyeuse #plantroutine ? Tentant.

Mais quand même un peu troublant. Bizarre comme cette déferlante de feuillages made in China à base de polymères divers ne semble gêner personne. Quid des vertus anti-stress du #homegardening ? Et des propriétés dépolluantes des plantes d’intérieur ? On a changé le storytelling : aujourd’hui, vive leurs cousines artificielles, non allergènes et non toxiques pour les « pets » ! Va-t-il falloir s’habituer à ne plus pouvoir débroussailler le vrai du faux ? On a croisé récemment dans un concept-store un imposant faux palmier en pot…aux palmes inférieures toutes jaunies-racornies. Une contrefaçon de haut vol ! Quasiment un clone .  At home aussi, selon Apartment Therapy, on peut se lancer dans le faux et l’usage de faux. « Rempotez votre plante artificielle dans une jolie céramique artisanale. Disposez un peu de  terre, ou de la mousse de fleuriste, sur le substrat »…

Franchement, a-t-on besoin de mettre –volontairement- plus de virtuel dans notre réalité ? Fake plants, fake news, faux gens cachés dans notre téléphone ou notre ordi…C’est quoi la prochaine étape, avant le chat-robot (non allergène) ? A court terme, c’est sans doute la généralisation d’un procédé largement utilisé dans les lobbies d’hôtel et les galeries marchandes :  les végétaux dit « stabilisés ». De vrais arbres, plantes, arbustes, dont on ponctionne la sève dans la fleur de l’âge. On leur injecte à la place une potion mystérieuse qui les préserve intacts, parfaits, éternels ou presque. Ce n’est plus très « green ». Mais c’est très « Soleil Vert ».

Photo fausse plante :Design blog HGTV