Pourquoi on a de beaux restes ?

Le Futiloscope a une certaine admiration pour les gens qui flairent la tendance encore mieux que lui. Comme Blandine Boyer, par exemple. Alors que le confinement a fait se ruer  des milliers de citadins à la campagne, et que les journaux nous prédisent désormais un formidable mouvement d’exode rural à l’envers (« Ils reviennent un à un au pays, pour vivre le reste de leur vie, lalalalalalère… »), Blandine a devancé l’appel ! Ça fait bientôt deux ans qu’elle a quitté la capitale pour le Piémont Cévenol, où elle retape depuis des années une maison familiale isolée. Blandine ? C‘est notre meilleure copine cuisinière/ styliste culinaire/ auteure de dizaines de super livres de recettes. Née au Maroc, elle a grandi en Lozère et en Ardèche, en fonction des affectations de son père garde forestier. Elle été costumière et traiteur pendant 10 ans à Montréal,  avant de bosser 30 ans à Paris. Son nouveau décor ? « Deux hectares et demi de garrigue, de prairies et de vergers,  avec une rivière et des milliers de bambous…Je suis à ma place, c'était une évidence de "reprendre" ces terres même si je dois me battre seule et sans fin contre les épisodes cévenols, les sangliers, la cloque du pêcher et les ronces, tel Sisyphe… » Son programme ? «  Dé-consommer, planter, débroussailler, réparer, recycler ! »  Et cuisiner, bien entendu : « Grâce à mon double ADN de paysans miséreux, vivant quasiment en autarcie , à ma mère qui m’a appris, enfant, à glaner et grappiller, j’étais super préparée pour le confinement. Je cuisine des falafels aux herbes de la garrigue, du tajine de sanglier aux pousses de bambous et à la semoule de châtaignes…Je suis infiniment privilégiée, ma vie a à peine changé.Vu d'ici, l'idée de faire des puzzles et des apéros virtuels est carrément surréaliste ».

Photo: Juliet Bowden

Bon , vous vous en doutez, si Blandine est aujourd’hui l’invitée de notre grande série « Le Futilo Confiné » (ou à peine déconfiné), ce n'est pas pour vous servir un grand couplet sur la décroissance , ou la frugalité joyeuse et généreuse. C’est parce que l’auteure de « SOS Restes » (paru en 2006, devenu so 2020, et disponible ici ) est aussi une championne du « no waste », autre tendance chère au Futiloscope ! Ne pas jeter, ne rien gâcher : une évidence, quand on a des racines paysannes, et qu’on vit en plein cambrousse, loin d’un supermarché. Ces derniers temps, c’est aussi un vrai défi pour les citadins confinés, nettement moins entrainés. Qui n’a pas cédé au « panic shopping » et stocké des tonnes de produits frais  ?  Qui ne s’est pas retrouvé avec des quintaux de pain rassis et de légumes flétris ? Alors, on a demandé à Blandine de nous confier trois de ses meilleurs trucs anti-gaspi. Pas des recettes  alambiquées de galantine d’épluchures ou de tempuras d’arêtes de poisson, qui mettent le souk dans la cuisine ... Juste trois mini-recettes qui se transforment en réflexe et qu’on adopte …à vie ! Les voici.

Avec le pain rassis : les croûtons parfaits

Photo : Blandine Boyer

Mettre tout le pain rassis ( blanc, seigle, complet, aux noix...), coupé en cubes dans un saladier, saupoudrer d’herbes séchées (thym, sauge, origan…) et/ou épices , saler et arroser généreusement d’huile d’olive.

Bien mélanger avec les mains puis étaler sur la plaque du four protégée d’un papier cuisson. Faites dorer 10 à 15 min en remuant 1 ou 2 fois en cours de cuisson.

Ca se conserve 15 jours dans un sachet à zip. On prélève au fur et à mesure de ses besoins (pour la salade, la soupe, les épinards…). Ou on mixe au robot pour faire de la chapelure.

Et bien sûr, on n’allume pas le four exprès, on enfourne lorsque quelque chose d’autre cuit déjà…

Avec les rogatons de fromage : une sauce pour les pâtes

Photo: Blandine Boyer

Râper tout le fromage dur et sec (emmental, gouda, comté, vieux chèvre…) à la main ou au robot (au robot, on peut même râper les croutes de parmesan). 

Dans une petite casserole, faire blondir de l’ail émincé dans un peu de beurre. Ajoutez le fromage râpé, le fromage mou coupé en morceaux et le fromage crémeux (restes de Vache qui rit, bleu émietté etc..). Couvrir à peine de lait et porter doucement à frémissement tout en remuant au fouet. Donner un coup de mixer plongeant au besoin, poivrer et servir aussitôt avec des pâtes type penne

Avec les champignons de Paris noircis : des petits sandwichs très british

Photo : Blandine Boyer

Faites sauter les têtes et les queues de champignons de Paris oubliés dans le bac à légumes au beurre ou à l’huile d’olive, saler.Une fois refroidi, mixer légèrement au robot avec un peu de mayonnaise ou de fromage ail et fines herbes et un peu de jus de citron, poivrer. Tartiner sur le pain de votre choix. C'est du pain de mie ? Ajouter 3 cèpes séchés trempés 10 min dans de l’eau bouillante avant de mixer, et par ici les  tramezzini !

Merci Blandine ! Pour plus de recettes, piochez dans sa vaste bibliographie. Mais surtout, suivez son Insta @blandineboyer, sur lequel on ne s’ennuie jamais : des devinettes botaniques , des "schmilbliks du jour", des bouquets sauvages, de la "cuisine paysanne" revisitée… et même les castors de sa rivière, saisis by night à la caméra infra-rouge !